Ni vue. Ni connue. J't'embrouille.

[Zoé Zéro]

Au beau milieu d'une nuit écrasée par la pollution atmosphérique, plus aucune trace de la petite borgne, dans la grange.

Elle est là bas, au loin, poussant une brouette au milieu de l'immonde gadoue des environs, dans un silence...de mort. Le genre de brouette merdique qui sert à entasser les pierres, quand les gaziers reviennent de leur labeur dans la montagne...
Elle est là-bas, évoluant dans la pénombre, se défilant discrètement à la faveur du regard de quelques gardiens bouffis de sommeil, et de l'oeil boursouflée d'une lune malade, jaunâtre, dans le ciel pétrolifère, siamoise phtisique de son mauvais compère du jour.

Quelques mots grommelés, à propos d'une récupération de cadavres, alors qu'on lui ouvre les portes, sans faire d'histoire. La routine macabre, après tout. Personne n'aura remarqué la grosse bonbonne de gaz, au milieu de la carriole, à peine camouflée par quelques longues toiles de tissus beiges bien épais... Ni le bouchon vert pomme d'une bouteille de détergent, qui dépasse d'un côté...

Elle est vêtue d'une combinaison en plastique, ou plutôt, d'un sac poubelle troué à la tête et aux bras, qui camoufle de façon grossière ses formes, pourtant bien exposées pendant la journée.
Avec sa clope au bec, éteinte. Des gants en plastique rose. Il ne manque plus que les bigoudis dans les cheveux, pour en faire une vraie petite ménagère-éboueuse du dimanche, peu commode, et mal embouchée...


…


Il doit être dans les environs de quatre heures du matin, quand un bruit sourd retentit, à quelques kilomètres de la communauté, au pied des montagnes qui s'élèvent au sud-ouest. Comme si le ciel, ou une entité supérieure, venait de s'éclaircir la voix.
D'ailleurs, en parlant d'éclaircie, une vague lueur accompagne la brève clameur. Pendant quelques secondes, en y regardant de plus près, aux jumelles, le doute n'est pas permis: c'est une petite boule de feu, littéralement, qui troue la pénombre, l'espace d'un instant.


…

Le soleil émerge à peine. Six heures et des brouettes. Dans celle de la gamine, qui se repose à cinq cent mètres de la communauté, trois grands sacs beiges, tous de la longueur d'un homme.
Bien remplis.
Bien ficelés.
Aucun cadavre ne montre le bout de son nez.
Deux sacs sont tâchés de souillures diverses, imbibés de l'intérieur...on devine du sang, du vomi, de la bave...classique.
Le troisième est comme neuf, mais lui aussi semble contenir un corps.

La jolie môme ne porte plus son affreux sac poubelle, mais toujours ses gants en plastique rose.
La clope n'apparaît plus entre ses lèvres.
Seul un sourire béat trône au milieu de sa figure fatiguée, elle qui, de coutume, fait toujours la gueule. Assise en tailleur, la tête appuyée contre le métal de son corbillard, Zoé tripote avec langueur son tatouage, en suivant le cercle.


Une sale odeur de barbecue émerge de sa peau bronzée.

[Jo Clay]

Le groupe de cavalières aura soulevé de la poussière toute la nuit; lancé au grand galop en ligne droite... Retour du bout du monde; intitulé de la mission? "Non salope la terre n'est pas ronde". Au programme, la fière allure d'une Kieffer hargneuse, clope éteinte coincée entre ses dents serrées, l'imperméable maculé de sang aux manches, et de poussière, ailleurs. Au programme, la soupe de grimace d'un visage cerné, creusé, malade et pas vraiment aimable... Des cris, probablement, insultes et gueulantes... Bref, au programme, le retour de la cavalière à la maison... Et tout ce que cela implique... Mais pour l'instant...



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Si le *clic* du chien de l'arme à feu tiré en arrière n'aura pas plus que cela éveillé les soupçons d'une fossoyeuse enfoncée dans ses pensées, c'est le contact froid du canon de la dite arme à feu, appliqué contre la tempe de la donzelle, qui lui aura sans doute confirmé que oui, maman, quelque chose cloche dans ta soupe. Peut-être aussi la présence de la cavalière silencieuse, accroupie à côté d'elle, à quelques centimètres, en train de la braquer, tout en continuant de mâchonner le cul d'une clope éteinte. Elle appuie un peu plus le canon de son arme contre le coté de la tête de la mexicaine, de façon à la pousser un peu.

"Bonjour... La belle au bois dormant... J'te dérange pas?"

Un reniflement disgracieux, alors que l'arme toujours braquée sur la belle, la brunasse détaille et scanne de ses yeux rouges, jaunes, et allez savoir quels tons douteux, la tenue de la princesse du marais... De sa main libre, elle tire la clope éteinte de son bec, pour la coincer entre son pouce et son index, et cracher un glaviot épais, jaune foncé, au sol. Elle replace la clope entre ses lèvres, passe sa main dans les cheveux de la jeunette, lui caresse littéralement le crâne, tout en continuant de la braquer.

"J'm'appelle Jo Clay Kieffer, et là..."

Elle désigne du menton une fillette, armée d'un arc, qui se tenait à quelques pas de là, et pointait une flèche sur la mexicaine...

"Ca c'ma Tamarie... Ma p'tite fille adorée... Je l'aime tu sais... J'l'aime tell'ment... Y disent que j'suis pas foutue d'm'en occuper... Mais c'est faux... C'est faux ça... C'est tell'ment faux, ma caille..."

Les caresses dans les cheveux se font plus fébriles, alors que la demeurée est secouée d'un rire nerveux... Rire nerveux, qu'elle tente de contrôler, avec plus ou moins de succès. Au final, elle empoigne la Zoé par le soutien gorge, s'accroupis par dessus elle, pour placer cette fois l'arme sous sa gorge.

"T'fous quoi ici, pétasse? C'quoi ton p'tit manège... T'as la gueule d'la salope qu'attire des emmerdes... Et t'sais quoi? J'aime pas les emmerdes... Pas du tout."

[Alisha Kamakshi]

Fébrile ? Alisha l'était aussi. On le serait pour moins que ça vu la chaleur étouffante. La mexicaine avait disparu. Ni à la grange ni ailleurs et la radio de sa comparse ne répondait pas. Du haut du mirador, elle finira par effectivement voir la boule enflammée, se passant une main sur le visage. Elle, ayant suffisamment côtoyée la tarée sentait le signe d'une connerie.

Elle fit mine de rien. Ne pouvant dormir, elle avait passé son temps à ruminer, ressasser quand enfin résonnèrent des bruits de sabots reconnaissables entre tous. La radio de la brune qui grésille avec un : "Jo !"

C'est vrai, l'indienne s'était efforcée de ne pas dormir pour vérifier que la petite famille revenait bien à domicile comme promis. Pour l'occasion, elle avait fait un effort vestimentaire. Oh, rien de provoquant, juste un jean et une marinière beige, un poil trop grande pour elle. Ses cheveux retombant sur ses épaules, elle les avait torsadé pour obtenir d'eux qu'ils ondulent légèrement, maintenus par un simple foulard. Pas de bijoux trop voyants ni clinquants cette fois, plus de simplicité hormis son maquillage habituel. Affublée comme ça, on croirait peut-être bien à une adolescente de loin... Ce qui ne sera pas tellement le cas pour qui fait attention à son visage de près. Une lèvre tuméfiée et une belle paire de cernes en prime. Les traits creusés et la mine pâle. Visiblement, l'indienne aurait pu peut-être concourir au déguisement du zombi le plus réaliste.

Vient un moment où l'impatience se lit sur son visage et qu'elle descend de son éternel perchoir. Devant la sortie, elle montre les portes jusqu'à ce que ces dernières s'entrouvrent pour la laisser sortir... D'un pas lent et indécis, le regard désespéré.

[Tamarie]

Parait qu'on rentre à la maison, retour exprès, tout le monde semble crevés, Jo plus que les deux autres, surement les heurs passés à la radio. En tout cas c'est le grand retour, depuis la veille, elles galopes, les chevaux tirés aux maximum, elles avance vers la maison, Shangri-la l'attendue.

Montée sur son cheval, la bride entre les dents, la petite se tapote, retirant la poussière qui revient sans arrêt, c'est vexant mais elle veut être toute belle pour rentrer, embrasser tout le monde, découvrir les nouveaux. C'est sur une aube chaude et humide qu'elles entrent dans le marais, entré gardé d'arbres et de merde.

Au loin, une fossoyeuse, sacs de plastique remplis à ras, un bandeau sur l'œil, surement un pirate ou quelque chose comme ça. Vu la réaction de sa mère, elle prend son arc et braque la corsaire, mais la Jo aimée est de plus en plus violente, pour pas grand chose, c'est pas un croque mitaine, puis aussi proche de Shangri-la, elle peut pas faire n'importe quoi sans risqué une flèche ou deux.

Maman!

Elle est pas méchante, la frappe pas si fort!

C'est nouveau, elle critique les ordres de sa maman, mais c'est pour la bonne cause, les taches de sang qui recouvre sa belle robe mauve en dit long, elle veut plus tuer quelqu'un d'innocent.

[Zoé Zéro]

La gueule de la salope qui attire les emmerdes...
On pouvait bien y croire, devant le spectacle d'une gamine de neuf ans, un arc presque plus grand qu'elle serré dans sa petite pogne, prête à lâcher le dard pour qu'il se fiche droit dans l'oeil valide, planté dans la brouette, derrière.
Ou cette grande escogriffe, grande diplomate devant l'éternel, qui lui colle son phallus d'acier contre la gueule, et qui débite un propos dans lequel quelque chose cloche.

Elle a les bras vermoulus, la Zoé, et l'oeil peu vivace, sur le moment, alors que sa tempe s'abouche au canon...

Quand la Kieffer la prend par le soutif, et que l'arme vient jouer au pré-pal, les lèvres bien charnues bougent dans tous les sens, essayent de trouver les mots, qui ne sortent pas... Les mains, elles, plastifiées façon Mapa, essayent de s'accrocher à un morceau de réalité. Un peu de terre sèche, pour l'une, un petit pan de la manche de l'imperméable, pour l'autre.

Enfin, comme un coulis de lave, difficile à extirper, les mots affluent, alors que sa gorge s'éprend de va-et-viens flippés...

« J'fais pas d'histoires, chica. Putain non. J'fais pas d'histoires... »

Elle lève son oeil en diagonal, sans doute pour désigner les sacs qui dépassent de la brouette...

«Putain non. J'm'appelle Zoé, et j'fais pas d'histoires. J'dois ram'ner la muerte au bercail, t'entends... J'suis d'la maison. Putain ouais.»

Un gant plein de terre remonte soudainement vers la main de la Jo Clay, en train de lui tripoter les cheveux. Zoé lui enserre le poignet, avec un semblant de délicatesse, d'abord...
Elle commence à émerger, et son visage se couvre d'indignations, de mimiques qui transpirent le dégoût, alors que sa jambe droite tremble comme une feuille...non pas comme guidée par la peur...mais plutôt par une sorte de tics nerveux... Et puis tout d'un coup...

«Puta madre, 'rrêtes d'me tripot' chica. Bute moi ou 'rrêtes ça... Mierda. SALOPE ! CHINGA TU MADRE ! 'RRETES CA BORDEL ! 'RRETES !!! HUMPPFFF !!!»

Cette fois, elle ne se contrôle plus, et essaye d'échapper aux vilaines pattes de la Jo Clay par tous les moyens... On dirait un animal sauvage, en cage, qui se bat contre les chimères de l'enfermement. L'arme n'a plus l'air de faire le moindre effet. Ses mains fébriles partent dans tous les sens, pressent un nichon, tirent violemment sur l'imperméable, essayent d'écarter au plus loin le visage et les bras...en hurlant, soufflant, toussant...

[Jo Clay]

A partir de là, difficile de dire qui a été l'enculé en premier, de l'oeuf ou de la poule... Peut-être quelque chose cloche-t-il chez les deux. Va savoir... En tout cas, c'est certain que quelque chose cloche...

Quand la jeunette se met à gesticuler, en hurlant, c'est certain, Jo le sait : elle a loupé une marche... Malgré les protestations d'une Zéro en furie, elle ne lâche pas prise, la crasseuse mercenaire. Elle s'accroche de plus belle au soutient gorge; difficile à bouger, la salope endurcie par les entrainements et les combats... Elle n'a même pas entendu Tamarie, crier; trop absorbée par la bête déchaînée, sous elle.

Son arme toujours serrée au poing, brusquement, elle agrippe les cheveux de la Zoé, vient plaquer son avant bras contre sa gorge, en la faisant basculer sur le coté : au sol dans la poussière. Elle tire les cheveux de plus belle, en continuant d'enfoncer la gorge sous la tranche de son bras, rapproche son visage de celui de la mexicaine, pour murmurer, d'abord :

"A... Arrête de bouger... Arrête... Je... J'vais pas te faire de mal... Je..."

Pas te faire de mal, mon cul. Sans doute pour cela qu'elle étrangle littéralement la malheureuse, tout plaquant presque son visage contre le sien... Elle plante ses yeux malades dans l'oeil unique de la pauvre enfant... Hurle, cette fois :

"ARRETE DE BOUGER !! SALOPE !! CALME TOI !! J'VAIS T'BAISER S'TU CONTINUES !"

Fatiguée, la Kieffer? C'est bien possible. A bout de nerfs? C'est très probable... Elle ne fait plus attention à Tamarie, derrière elle, toute occupée qu'elle est à tenter de maîtriser la donzelle. Pourquoi? Aucune idée... Ca sera pas la première fois, c'est comme ça. Alors elle serre, elle serre à la gorge... Et tire la pleine poignée de cheveux, en serrant les dents. Cette fois-ci, c'est sûr, quelque chose cloche...

"J'vais... J'vais te butter, pute... Dernière fois qu'tu m'entubes."

Et de continuer de serrer. Ca pique.

[Alisha Kamakshi]

Sur ces entrefaites, arrive l'indienne aux allures timorées tout d'abord. Une... Deux... Trois... Quatre silhouettes... Tamarie tend un arc, jo baissée sur une autre et Tara.

Quelque chose cloche. Ça sent le roussi. Le cerveau de l'indienne calcule vite... Trouver de quoi détourner l'attention... Vite et bien... On ne peut faire plus simple que :

Vous êtes ENFIN rentrées !

Elle se précipite l'indienne, court de toutes ses forces en répétant toujours la même chose comme une hystérique. Sans cesse, comme un CD rayé et bloqué, sur tous les tons. C'est vrai, elle ne va pas très bien en ce moment l'indienne. Faut dire qu'elle a attendu longtemps ce moment. Les dernières nouvelles ne sont pas bonnes, le pétage de durite n'est pas loin mais il est doux, pernicieux et l'araignée au plafond tisse très lentement sa toile. Cela commence par des cauchemars, cela soulève des haines et des rancœurs contre un ennemi pas imaginaires qui vous a ôté l'espoir, et ça se finit par des insultes gratinées avec n'importe qui ou à subir tous les outrages en silence dans un local glauque puis tenter de tout cacher du mieux qu'elle pouvait. Sans compter la prise de comprimés et d'alcool les soirs de solitude pour tromper l'ennui et délirer tant bien que mal, mais ceci est une autre histoire. Non, elle allait pas vraiment bien. Mal aimée, ou aimée de travers, rien pour la rassurer si ce n'est une Jo Clay Kieffer qui, malgré ses attitudes de connasses, avait toujours été là alors elle a choisit vaille que vaille, ce qui pouvait la raccrocher à la vie même si l'autre était encore plus tarée. Cherchez pas docteur, c'est la tête...

Et c'est la tête de Tamarie que sa main caresse alors qu'elle parvient à leur hauteur. Elle observe le manège, en fronçant les sourcils, tout en faisant signe à l'enfant de baisser son arme. Elle jettera un coup d'œil sur la robe de Tamarie, se mordillant la lèvre inférieure déjà tuméfiée qui se met de nouveau à saigner. Elle tente de comprendre ce qui se passe, voit les dépouilles joyeusement emballées et Jo sur Zoé. Le temps que sa rétine imprègne la scène et que son cerveau las envoie une réponse, plutôt une question même... en guise de préambule.

Vous voulez pas plutôt rentrer au lieu de vous fracasser ?

[Tamarie]

Se qui cloche c'est sa nouvelle maman, rien de plus, rien de moins. La petite n'est pas entendue, n'est pas écoutée, elle n'a que 9 ans après tout, pourquoi quelqu'un ferrait attention à elle. Mais voilà la vérité, elle en à marre la petite de 9 ans, elle à tuée, deux fois, elle à une arc, certes disproportionné, mais arc quand même, et elle sait s'en servir... ou pas.

L'émotion est grande pour un petit bout, et la flèche part, sans vraiment que Tamarie l'ait voulu, mais elle part, et siffle aux oreilles de Jo et Zoé. Oups se dirait-elle, mais Tamarie à un problème plus grand, Jo va zinguée quelqu'un de la maison, et ça c'est se serait le point de non retour.

La petite, déjà les larmes aux yeux et la morve au nez, fonce sur le rixe des deux louves en chaleur, elle agrippe le bras étrangleur et tire, de toute ses forces de tout son poids, elle tire le bras de sa mère pour qu'il lâche son étreinte mortelle. Pour prendre appui, elle met son pied sur le ventre de la pirate, pas pour en ajouter à sa douleur, juste parce qu'elle est trop petite et que comme ça elle peut forcer plus facilement.

[Zoé Zéro]

Oh que oui, ça pique, ça s'étouffe, et tout le tremblement, alors que la teigne basanée, à terre, continue de gigoter, encore plus révulsée par le contact poisseux entamé entre transpiration et poussière...entre l'ignoble mercenaire peu ragoûtante, et la mexicaine qui sent le savon et le cramé... Elle pousse des gargouillis infâmes, la bile remonte et suinte à la commissure des lèvres. L'oeil est comme sur le point de sortir de son orbite, l'haleine de la Kieffer tout contre son iris dilaté...
Elle passe du blanc au rouge, rouge qui commence à virer au violet...

« GuUuUUrrrPUUubbrrrPUuMMmmMMéééégrahuuuuummmpffffdiiiIIiiCMURBLURG »

Allô Docteur, médicament ? Peut être, peut être. A la voir, comme ça, on dirait effectivement qu'elle va plutôt claquer d'une bonne crise cardiaque, en lieu et place de manquer d'air, les nerfs matelots quittant le navire, avec le capitaine cerveau qui se bourre la gueule, pour un cocktail de pétrole brut aux amphétamines saupoudrés de cocaïne...
Ses mains ivres essayent vainement de chopper une des plaquettes de médicaments fourrées dans son soutien-gorge, alors qu'elle est à deux doigts de l'apoplexie, avec la harpie hurlante qui commence à peser, et son crâne douloureux, qui semble vouloir s'éjecter avec le cuir chevelu, comme un diable de sa boîte...peine perdue, le dit soutif ne tient pas le choc des assauts antérieurs, et se dégrafe dans un craquement, par devant. Les plaquettes tombent au sol, la poitrine n'est plus que cachée à moitié, les bonnets pendouillant encore grâce aux bretelles.

Et voilà la gosse qui commence à lui enfoncer le flanc. C'est pas beau à voir...

[Jo Clay]

La flèche, qui siffle à quelques centimètres d'elle et de Zoé, elle n'y a pas pris garde... Pas plus qu'elle n'a pris garde aux exclamations d'Alisha, toujours trop occupée à étrangler, tirer, maltraiter... Elle est décidée à tuer. Fermement... Une fois de plus, une fois de moins... Qui ira s'en plaindre? Peu de chance qu'une famille de mexicains débarquent dans les prochains jours pour porter plainte... L'idée la fait sourire, d'ailleurs... Assez bêtement, alors qu'elle tue.

"Pétasse... Tu t'sens crever?"

Elle serre... Ca, on peut le dire. Elle serre, quand la main de Tamarie vient s'agripper à son avant bras. Que la petite vient se coller contre elle... Jusqu'à ce que son regard ne croise celui désespéré de la môme... "Trésor..." La pression qui se relâche, peu à peu, alors que la main de la cavalière quitte les cheveux de la mexicaine, pour aller caresser doucement le visage de la petite... "Ai pas peur... Maman est là, ma puce... Ai pas peur..." Regard fatigué, mais tendre, sur la fillette... Puis attiré ailleurs, encore...

"Alisha..."

Pression complètement relâchée, sur la gorge d'une Zéro quelque peu bleutée. Tant bien que mal, la mercenaire se relève, sans plus accorder un regard à celle qu'elle tentait d'écharper comme une merde... Elle époussette son manteau, tente de se donner un minimum de contenance... Pousse le luxe à passer une main coquette dans ses cheveux crasseux.

"Hey... Alisha..."

Doucement, elle traine des pieds, en direction de l'indienne; vient se placer devant elle, l'examine de haut en bas... L'indienne... Qui peut sentir l'odeur infecte de sa complice, alors que celle-ci pose sa main sur son visage, doucement. Main qu'elle laisse descendre, jusqu'à caresser du pouce la lèvre tuméfiée. Ici aussi, quelque chose cloche... Et la Kieffer a beau être tarée, tout ce qu'on voudra, elle l'aura noté : Alisha si maigre... Si mal... Et ces vêtements... Rare de la voir couverte de la tête aux pieds, comme ça... Surtout par 40°C à l'ombre.

"Alisha... Hey... J'suis rentrée. T'vois qu'c'est la vérité."

Pas vraiment de cérémonial douteux; elle se contente d'enlacer la danseuse, sans lui demander son avis. La serre contre elle, en plaçant son menton dans le creux de son épaule... Elle lui caresse le dos; murmure : "C'qu'y t'arrive, bibiche... T'ont fait quoi, ces enculés..."

[Zoé Zéro]

Abattue, gueule maintenant contre le sol, légèrement de côté, les seins enfoncés dans la caillasse bien sèche, sa respiration ressemble au tintamarre déchirant d'une mobylette en fin de vie.

Ses mains fiévreuses rassemblent les plaquettes de médicament douteuses éparpillées un peu partout autour, en un petit tas unique, près de sa tête... Avec les gants et la terre, il n'est pas évident de faire décoller les pilules de l'emballage.

Trente secondes ainsi, à moitié dans les vapes, juste en dessous du tas de cadavres, à l'ombre de la brouette morbide, avec le bruit du plastique qui se tord inutilement... Elle essaye, mais n'y arrive pas. Ces fichus pilules refusent de sortir.

Elle relève l'oeil vers Tamarie, d'où s'écoule une larme. D'une voix cassée, la bouche tordue de douleur, alors que sa jambe droite continue de bouger frénétiquement, et que les deux autres connasses entretiennent leur relation:

« Pssssst...les...les blancs et gris...t'vois...pssst...niña...blancs et gris...pssssst...Tam...niña...s'teup'... Dos. Claro ? Dos. »

Elle redresse un peu le poignet, et lève son majeur ainsi que l'index, en signe de victoire... Ou en signe de deux, tout simplement. 40°, pâle comme un linge malgré ses origines, écrasée comme une merde dans la poussière. Un poisson à l'agonie sur le rivage.

« Deux pil...niña...claro...pilules...blancs et...psssst...gris...claro...dans ma...psssst...gris...psssst...claro...bouche... Argh.»

La fossoyeuse, sur le point de rejoindre ses clients. Ironie du sort.

[Tamarie]

VICTOIRE! Tu parles d'une victoire, Jo a lâchée la mexicaine qui rampe à présent devant les pieds de la petite. Et la grande qui s'en va aussi tôt rejoindre Alisha, alors que son trésor pleure, plantée comme un piquet. La tête en arrière, de grosses goutes de morves et de larmes coulent sur son visage qui se nettoie. Son visage est déformée par une grimace de bébé qui pleure, mais pas un son. Ironie du sort, la victime de sa mère lui parle dans une langue qu'elle comprend pas, puis elle s'appelle pas Tamniña...

Elle penche la tête, des goutes perlent sur son petit nez. Le regard noyé, elle observe la jolie corsaire qui lui demande ses pilules, ça semble urgent, mais elle ne réagit pas tout de suite, elle tente de reprendre ses esprits.

Elle se penche, se jette a genoux. Avec ses petites mains elle ramasse les pilules blanches et les grises, comme demandée, elle veut l'aidée, lui venir en aide, réparer les conneries de sa mère mais c'est difficile, ses yeux sont noyés, et Jo est plus là.

Doucement, avec une grande tendresse, elle place les cachets dans la bouche de Zoé. Plus de larmes qui coulent, juste les lignes propres sur ses joues poussiéreuses témoigne de son chagrin. Elle caresse le visage de la victime qui reprend des couleurs naturelles, elle caresse ses cheveux, ses joues, son cache-œil.

[Zoé Zéro]

Les 'bonbons' sont mâchonnés, d'abord du bout des dents. Ils traînent un peu dans la bouche pâteuse, et finissent par glisser. La petite poupée qui pleure lui tripote la tête, et elle se laisse faire, complètement amorphe, pendant deux bonnes minutes.

La paupière se plisse. L'oeil roule dans tous les sens. Et soudain, Zoé entrouvre la bouche. Elle vient de remarquer le visage de Tamarie.

La latine finit par se redresser, en poussant sur les coudes, avec difficulté. A nouveau appuyée contre la brouette, elle jette un regard maussade sur son soutien gorge renforcé, maintenant défait. Soutien-gorge bousillé qu'elle retire, sans plus de cérémonie, pour le balancer au dessus de sa tête, parmi les morts emballés de la brouette. Elle contemple les deux billes étranges de Tamarie, encore un peu abasourdie, avant de serrer, tout contre la poitrine nue et le gros tatouage, la petite gosse, d'une seule main dans le dos...l'autre se chargeant furtivement de ramasser le reste des médicaments, direction la poche du pantalon de cuir. Pendant l'étreinte, par dessus l'épaule de Tamarie, Zoé lance un regard noir, furieux, ou peut être bien jaloux, dans le dos des deux autres bonnes femmes. Après cela, elle se risque à embrasser la joue de l'enfant, avant de lui adresser la parole. Mais brutalement, sans une once de délicatesse dans le timbre. Sans condescendance adulte foireuse.

« T'sais, j'l'habitude. Faut pas pleurer chica. Jamais. Là d'où j'viens y'a pires chiennes qu'ta putain d'mère. C't'une bonne maman qu't'as là. Putain ouais. Elle est chicos. Bien classe. Mais elle chlingue grave. T'piges l'embrouille niña ? Elle daube l'vieux fond d'chiotte à la turque. Et ça m'rend malade à crever. »

Zoé se lève derechef, sans un autre regard pour la gosse. Elle s'appuie un moment sur un sac, des deux mains, pour se concentrer sur son équilibre, et ne pas retomber, sans doute.

A moitié à poil, mais sans aucune pudeur, visiblement...ça fait mauvais genre. Surtout quand elle se met à dégueuler les pilules accompagnées d'un vieux fond de repas de la veille, pliée en deux, à côté de la brouette. D'un revers de gant mapa, elle se nettoie les lèvres, avant d'en revenir à la petite, comme si de rien n'était.

« Hep niña. Viens 'vec moi s'tu veux, si mamá est d'ac. J'vais voir mémé La Momia, et la Cucaracha, à la maison. Pour la livraison d'connards. Au cimetière.»

[Alisha Kamakshi]

L'indienne se retrouve finalement dans les bras de Jo. La tête au creux de son épaule, elle la serre contre elle tout en retenant ses larmes de joie, ou peut-être de tristesse. Le temps fut long, arrêt minute émotion, elle semble ne plus trop réaliser si c'est un rêve ou la réalité.


Tu es enfin rentrée ! Avec Tamarie ! Saines et sauves ! Dis-moi que ça va être comme avant... J'ai besoin de l'entendre. Je suis si fatiguée... Je suis si lasse... Je croyais tellement de choses endormies mais c'est comme le ressac de la mer, ça revient toujours comme pour me noyer... mais ça va mieux maintenant, vous êtes là.


Des lunes sans fin dont la dernière fut un véritable cauchemar. Faut dire ce qui est, la vie est parfois mal foutue quand même. Alisha ne prête franchement plus attention, du moins au début, à l'enfant et l'hispanique. Elle se contente d'être là, de profiter de cette accalmie pour trouver du réconfort.

Drôle de rencontre en fin de compte mais au moins la danseuse des bidonvilles avait raison sur le fait que ces deux-là n'auraient jamais dû se croiser. La folie, ça déborde, ça suinte de partout, ça ronge. Alors, elle jette un vague regard circulaire sur tout ça, vaguement interloquée. Un trio de femmes et une gamine. Un quatuor avec Tara, mais elle, elle ne comptait pas aux yeux d'Alisha. Pas vraiment. Il n'y avait néanmoins pas la place pour un homme quel qu'il soit, ainsi le ressentait-elle.

Elle réprime un sourire en se souvenant des quatre filles du docteur March. Un bouquin qu'elle avait lu il y a longtemps, sans doute durant son adolescence. Ou peut-être plus tard quand on lui apprit à déchiffrer des tonnes de mots. Peut-être que c'était ça, en plus trash et glauque, certes. Elles avaient perdu leur si cher père durant la guerre de sécession, jamais revenu. Leur mère était morte de chagrin, alors elles avaient dû apprendre à se soutenir et se défendre, puis peut-être bien à se supporter. Tout à son délire mignonnet, Alisha ne se rend pas compte qu'elle n'a de cesse de marmonner...

On est une famille, maintenant. On est une famille, maintenant...

[Jo Clay]

"C'ça bibiche... C'ça... T'inquiète de rien va..."

La cavalière, plus crasseuse qu'un régiment de porcs, ne prête plus attention, elle non plus, au manège qui se trame dans son dos, avec la petite et la mexicaine... Toute occupée qu'elle est à serrer Alisha contre elle, la caresser; lui murmurer ce genre de conneries, comme quoi tout va aller beaucoup mieux, maintenant... Elle renifle, sale qu'elle est. Continue de presser l'indienne contre elle...

"Sûr ça va r'dev'nir comme avant. J't'embarque, t'verras. Au fond ça a pas vraiment changé... Ca chang'ra pas."

En décollant un peu son torse de celui de sa compagne, elle lui prend le menton, entre le pouce et l'index... Examine le visage fatigué, toujours interloquée par la lèvre tuméfiée. Elle fronce les sourcils, cherche dans les yeux de la danseuse un vague début de réponse aux questions qu'elle se pose... Mais va chercher des réponses dans des yeux, toi. Et parlons-en, des yeux, quand le regard rougis de la Kieffer s'enfonce dans le regard triste de la Kamakshi...

"Qu'est-c'qu'y t'es arrivée? T'as l'air canée... T'es... Ta lèvre, elle a quoi? Qu'est-c't'as foutu pendant qu'j'étais pas là... J'entendais leurs conn'ries, à la radio. Tous ces enculés, qui bavaient sur l'marmot qu'est mort. J'savais qu'c'tait d'la merde... J'leur ai dit d'fermer leurs gueules. M'faut toujours qu'y'en ait pour jouer au plus fin... Ca s'jouera pas comme ça. C'pas joué... Y'en a qui vont s'faire des copeaux d'bite 'vec leurs propres dents... J'te l'jure. M'pas encore... Pas encore."

La mercenaire enlace encore sa complice, puis en la tenant par la taille, fait volte face.

"Tamarie, t'vas nulle part avec oeil de lynx. T'viens embrasser Alisha..."

Et à l'attention de la borgne, sèchement :

"Toi t'as décidément une trogne à emmerdes... Ouv' tes sacs. J'veux voir c'que tu trafiques... Ouv' les sacs, et laisse discrétos tomber c'qu'a d'la valeur... On dira qu'c'est l'paiement pour la protection que j'suis en train d't'offrir, devant l'pat'lin... Pas vrai?"

La taille d'Alisha dans une main, et le flingue à nouveau dans l'autre, il semblerait que malgré les émotions du petit matin, l'appât du gain tienne toujours une certaine place dans l'esprit de la connasse. Plus doucement, elle glisse tout de même à l'indienne, en continuant de fixer la "corsaire":

"Tu m'racont'ras tout..."

[Tamarie]

Plongeons nous dans les méandres des pensées de Tamarie.

La petite regarde la pirate qui se balade les nichons à l'air.

"J'aimerais avoir des nènès aussi gros, ou alors comme ceux de Jo, bien qu'ils sont bizarres depuis un moment, au moins comme ça tout le monde il m'écouterait, c'est pas juste quand même."

Passe une main discrètement sur le haut de son tronc, rien du tout, juste ses cotes qui glissent sous les doigts noirs de crasse.

"Aller au cimetière avec les corps, j'ai pas que ça à faire non plus, mais si ça se trouve je connais des gens dans les sacs, ou alors c'est juste des croque-mitaines qui. Mais elle vomit dessus, je touche pas à ça moi, je me demande bien qui c'est en faite. On à quoi comme info: Elle est à moitié nue, elle porte un bandeau, elle parle bizarrement, elle est jolie, elle semble malade... Un pirate qui a la chiasse ou un truc comme ça moi je dis."

Se retournant vers sa mère et Alisha qu'elle n'avait pas vu, son visage s'illumine d'un sourire et cours se jeter dans les bras des deux femmes.

Shasha!

Elle passe sur la mexicaine, elle passe sur les sacs, elle est contente, comme toujours après un gros chagrin. Un chapitre vient de se terminer, un autre commence. Après les la pluie le beau temps.

[Zoé Zéro]

La borgne fait un bond, à l'évocation des sacs. Elle s'essuie le front rapidement. Bien sûr. Ouvrir les sacs. C'est évident. C'est la douane... La douane de la mort.

Un petit cutter sorti de la poche, elle se saisit d'un des cercueils de toile, vers le côté où se trouve le crâne. Zoé découpe vingt bons centimètres, dans le tissu qu'elle a surement dû coudre avec précision pendant un bon moment, cette nuit...
Ce qui l'obnubile particulièrement, quand elle observe du coin de l'oeil la scène en rose bonbon, avec retrouvailles pathétiques à la clef, c'est le putain de flingue que brandit la Jo Clay.
Le sac qu'elle découpe, c'est un des deux sacs tâchés de l'intérieur. On a pu voir sa main faire un écart, alors qu'elle semblait diriger ses doigts vers le bagage le plus propre...

Un craquement sec. Elle fait émerger une trogne blafarde et violacée hors du premier ballot...trogne d'où sort, par une narine, un scolopendre des plus majestueux...
Oui, majestueux, c'est le mot.
La bestiole, aussi longue qu'une cuillère à café, commence à grimper sur l'un des gants de l'hispanique, alors qu'elle maintient les bords du sac écartés. Le cadavre est celui d'un homme. Somme toute, son visage n'est pas plus défiguré que ça. Mort de soif, sans doute.

« Puta madre. J'trimballe des morts. Vu ? Des putains macchabées qu'j'ai ramassé toute la noche de puta madre. Alisha, 'plique lui. J'ni dope, ni or, ni... »

Un soupir las, quand elle laisse retomber le haut du sac, dans la brouette. Elle fourre la main dans sa poche. En sort une dent en or, un bracelet en argent, un vieux paquet de tabac à rouler, tout racorni. Piteux butin. Objets qu'elle fait rouler dans la paume de son gant, bien en évidence, le bras tendu devant elle.
L'ignoble scolopendre est arrivé au niveau d'une épaule nue, mais elle ne semble pas s'en apercevoir. A la fois vaseuse et sur les nerfs.

« C'est ça qu'tu veux ? Bordel d'merde, j'voudrais bien rentrer finir l'job maint'nant... »

[Jo Clay]

La cavalière pose un baiser sur le crâne de la fillette, et la laisse enlacer Alisha, pour se diriger, arme au poing, sur la borgne. Elle examine quelques secondes le fruit de toute une vie de pillages, dans le creux de la main gantée; grimace et secoue la tête, visiblement pas intéressée. "Hmm... Non... Remballe ta came." Sûre d'elle, elle range l'arme dans son ceinturon, se penche sur la brouette... Une chose est sûre : le chargement, combiné à la sauce chaleur torride, pue. Peut-être pas autant que la cavalière, mais il pue... Ce qui ne semble pas déranger plus que cela l'inquisitrice mercenaire, alors qu'elle se saisit de la mâchoire du maccabé découvert... Mâchoire sur laquelle elle exerce une forte pression, pour lui ouvrir la bouche, et renifler l'intérieur du bec.

"Hmm... Moép'..."

Elle laisse tranquille le cadavre, qui reste figé dans sa pose à la con, la gueule ouverte, gobant les mouches.

"Ok... Oeil de Lynx... Ca roule pour c'te fois."

Elle renifle, coince du pouce sa narine droite, pour souffler fort avec la gauche, et tirer au sol un jet jaunâtre... L'élégance toute Kiefferienne... Grandes manières pour une grande dame. Grande dame, qui laisse maintenant ballader son regard sur la poitrine de son interlocutrice, dont elle approche encore la zone intime : suffisament proche pour murmurer à son oreille. Sauf qu'elle ne murmure pas... Elle se contente de passer derrière la fossoyeuse. De lui tourner autour, en quelque sorte, toujours distante d'elle de seulement quelques centimètres.

Et aussi fine qu'une armée de routiers ivres, elle pose sa main sur la fesse de la jeunette. La laisse glisser entre ses cuisses, en murmurant bien, cette fois, à son oreille :

"T'as raison, ma caille... L'travail avant tout... File 'vec ta brouette..."

L'indiscrète main monte, et descend, dans l'intérieur de la cuisse, alors que toujours dans le dos de la Zoé, la Kieffer continue de murmurer :

"Mais j't'ai à l'oeil... Hin hin hin... T'sais qu't'as l'air toute fraîche, pomponnée comme tu l'es? T'sais qu'm'avoir comme bonne copine... Ca peut t'éviter pas mal d'emmerdements?"

Une tape sur la fesse de la mexicaine; la cavalière se décolle d'elle, et plus sèchement :

"Ramène tes cadav'. Et évit' d'déconner."

[Alisha Kamakshi]

Alisha récupère au vol Tamarie, la serrant contre elle.C'est vrai que la mioche lui avait manqué. Elle ne lui dit rien, n'a rien à dire mais fait preuve d'une déferlante tendresse pour la môme, comme cela n'avait pas été le cas avec personne depuis... Depuis... Depuis longtemps. Pensant ne plus trop savoir ce que c'était, elle redécouvre cette joie simple. Faut croire que ce n'était pas si compliqué.

Au comportement provocateur de la Kieffer avec l'hispanique, un soupir, des yeux qui se lèvent au plaf... Au ciel. Elle fait mine de cacher les yeux de Tamarie pour lui éviter ce spectacle affligeant, même si elle se doute que l'enfant a dû en voir de belles. D'ailleurs, l'indienne hurlerait, enragerait, trépignerait si elle savait. Enfin, elle sait mais elle ferme les yeux intérieurement.

Je crois que Jo s'est fait une nouvelle copine...

[Zoé Zéro]

La fossoyeuse garde tête baissée.
Les dents serrées. Ainsi que les poings.
Du rouge plein les joues.
Les jambes fébriles. Comme si elle était sur le point de pisser dans son pantalon.
Les articulations des genoux ont un peu de mal à la soutenir, tout d'un coup, prêtes à flancher, quand la main de la mercenaire lui avale le cul bombé, comme on tâte un melon, au marché...

On pourrait très bien la voir se jeter sur la Kieffer, pour rejouer un énième cat fight des familles. Seulement, la borgne ne demande pas son reste, et respecte les ordres, sans broncher...
Elle tourne le sac du cadavre dans la brouette, de façon à ce qu'on ne voit plus le visage, sans un regard pour la Jo. Les cheveux désormais hirsutes, après une nuit à crapahuter, et faire on-ne-sait-quoi, cachent son oeil fatigué... Cheveux qu'elle rabat le plus possible au devant des épaules, pour camoufler à peine ses tétons derrière quelques mèches arrivant à tomber jusque là, comme si la soudaine présence malfaisante de l'aventurière, à quelques millimètres de sa peau, lui avait redonnée un soupçon de pudeur... Les lèvres bougent, sans un son, comme si elle répétait les paroles entendues plus tôt... Comme ci, comme ça... On la sent pas bien, tout d'un coup.

Roule ma poule. Elle file à toute allure, après avoir lâché une espèce de phrase qui ne veut rien dire, faiblarde, confuse, mal articulée au possible, à destination de la tueuse en imper'. Elle trace sans un mot, devant la gosse et Alisha.

Ses bras tendus, qui poussent et poussent encore, dans la bouillasse, ne cessent de trembler qu'au bout d'une centaine de mètres.

Et là, en fixant le troisième sac, celui légèrement camouflé par ses collègues de malheur...celui qui est moins tâché que les autres, celui là, donc, lui arrache un abominable sourire en coin. Hideux sourire qui lui retrousse la lèvre supérieure, et lui creuse la pommette...


« Ni vue. Ni connue. J't'embrouille. »

...

« L'est temps d'te ranger, gringo. Bien failli m'fout' dedans. »

[Jo Clay]

La demeurée regarde la fossoyeuse s'éloigner, rapidement, en charriant sa brouette de cadavres... La scénette lui tire un sourire : satisfaite, la pute? Non... Pas vraiment... Pas satisfaite d'elle même, sur le moment. Juste pensive, avec son sale sourire en coin, alors que ses yeux mauvais s'attardent sur le cul de l'hispanique qui s'en va... On peut en être sûrs, quelque chose a fait *tilt*, dans l'esprit tordu de la Kieffer : fort à parier qu'elle n'en restera pas là. "A bientôt fillette... A bientôt... Hin hin..."


Retour à la réalité. Son regard se détache de la silhouette de Zoé, pour retourner à Tamarie, et Alisha. Sourire franc, cette fois. Rien de tordu dans son visage, rien de pervers dans ses yeux, alors qu'elle s'en retourne auprès du duo. Elles sont là, celles qu'elle aime, la Kieffer... Toute tracassée qu'elle puisse être. Toute dérangée, dérangeante, et tordue, qu'elle puisse se montrer. C'est une constante, une chose qui ne change pas : elle a beau être la pire salope maladive qui soit, elle aime. Et tout ce qu'elle aime est là, reunis devant elle. De quoi lui tirer un sourire. De quoi apaiser un peu les tourments de la multitude de pathologies qui l'assaillent...

"Alors les puces... On va pas rester ici, pour sûr. J'reviens pas les poches vides, j'ai d'la gnôle. J'l'ai choppée sur une vieille pétasse, qui rodait dans l'coin... On va s'humecter la menteuse un coup..."

Elle prend l'indienne par la taille, la petite par l'épaule... Une de chaque coté, et prend la direction du patelin, en les serrant contre elle. Elle rit... Ouais... Visiblement, ça va mieux, les choses se goupillent bien...

"Toi trésor, tu boiras dans mon verre... Et toi bibiche, j'ai pensé à toi... En r'levant les impôts, j'ai pensé à t'prend' une bouteille... L'aut' pute en avait bien plus qu'elle pouvait en charrier, à son âge... Pis j'y ai pas tout pris, pour sûr... Putain Alisha. C'est bon qu'tu sois là..."

C'est sûr, elle est heureuse et elle se porte mieux... On peut le sentir. On peut sentir les effluves de bonheur, entre deux relents de crasse, et de mort.

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