Les marais ça pue... les chameau aussi [Sangsue]

par **Rascarcapac** Jeu 19 Mai - 17:15

Une fin de lune comme les autres où le soleil commençait à descendre doucement pour éclairer Shangri-La d'une teinte orangée, Saturnin, le front dégoulinant de grosses gouttes de transpiration, travaillait silencieusement au milieu du champ de pommes de terre. La chaleur était écrasante pour cette heure de la journée, et il avait dû remonter son bonnet pour pouvoir respirer convenablement, sans oublier la terre qui venait se coller sur ses habits trempés de sueur chaque fois qu'il grattait le sol. Obligé de se nettoyer régulièrement, il se redressait, faisant craquer son dos et ses épaules, pour les remettre en place et en profitait pour souffler un peu. Il s’essuyait le front avec le dos de sa main sale, observant les voiles de chaud qui faisaient onduler le soleil. La lune allait bientôt se lever et il avait fait son devoir pour la journée, comme on le lui avait demandé. Il était temps pour lui de rejoindre le bar après être passé par la savonnerie pour se décrasser un peu, et profiter de son temps libre. Pour changer son quotidien, Saturnin voulait trouver Gripis et lui demander de l’initier à l’alcool chez Tata Marie. Il avait pris soin de jeter un dernier coup d'oeil sur le champ avant de lui tourner le dos pour aller dans le centre. Il se curait les ongles sur le chemin, marchait mécaniquement, perdu dans ses pensées, tandis qu’une voix maintenant familière brisa soudainement ses songes : Zkapt, l'administratrice de Shangri-La, et elle avait quelque chose à lui demander. Il s'agissait de sortir de la ville et de s'enfoncer dans les marais afin de ravitailler Sangsue. L'occasion de voir la jeune fille que les nomades d’Edris, sa famille, étaient venus retrouver. C'était surtout un peu d'action, argument de poids pour l'ancien magicien qui n'aimait pas trop s'enterrer et qui évitait au maximum la routine... Saturnin lisait le petit bout de carton sur lequel étaient griffonnées les directives de l'administratrice. Ca ne lui paraissait pas bien compliqué, cependant, une ombre au tableau : monter un chameau... Il les avait vu ces bestioles, mais il ne s'était pas trop approché d’elles.

Ça pue un chameau…

Il avait eu vent d'un accident qui s'était déroulé un peu plus tôt dans la journée au sein d’un des enclos et il avait remarqué quelques badauds s'agiter tout autour, sans pour autant s’intéresser au comment du pourquoi, sûr qu’il ne souhaitait plus savoir ce qui c'était réellement passé maintenant... Après un rapide briefing ainsi qu'un emballage sommaire des vivres pour le ravitaillement, il suivi une courte formation théorique sur sa monture. Il était grand temps de bouger car la nuit tombait rapidement.

Un coup d’œil par-dessus l’épaule, une pensée pour les nomades…

Il avançait vers les marais, tirant sur les rennes de son chameau qui le suivait bien docilement. La bête semblait un peu vieille et peu vivace, pas plus mal pour Saturnin qui regardait plus derrière lui que là où il mettait les pieds. La petite caravane de deux arrivait en bordure des marais, annoncée par l’odeur nauséabonde qui commençait à attaquer leurs narines. De gros moustiques virevoltaient en essaims bruyants, éparpillés ça et là. Le magicien pénétra dans l’eau rafraîchie par l’ombre de la végétation, de l’eau jusqu’aux genoux, il avait décidé de commencer la progression à côté de son chameau. Il se donnait des claques au visage pour se débarrasser des insectes, qui parfois même entraient dans sa bouche, le faisant presque vomir, écœuré en plus par l'odeur. L'obscurité s'épaississait au fur et à mesure qu'il avançait dans les marais et l'eau vaseuse ralentissait ses mouvements le fatiguant bien plus que le sable du désert, finalement pas si désagréable. Il était temps de passer le relais et de se jeter à l'eau... au sens propre. A peine eut il posé son postérieur sur le dos de l'animal que celui-ci se mit en mouvement, surpenant son cavalier qui se laissa tomber de peur dans le demi mètre d'eau croupie. La main enroulée dans la sangle des rennes fit freiner sa monture, l’immobilisant afin de lui laisser une seconde chance.

-Ok mon pote, maintenant je sais comment tu fonctionnes...
*Et toi, sans commentaires, ou je te noie…*

Il raclait la boue sur ses vêtements, fixant silencieusement la bête dans les yeux, qui lui montrait ses dents, comme pour défier. Le deuxième essai fut pourtant concluant, Saturnin tenait bon, il n’était pas très rassuré, mais il s'accrochait. La bête avançait plutôt aisément à la lueur de la lune qui pointait haut dans le ciel maintenant, le point de rencontre avec Sangsue ne devait plus être très loin et il le fallait, car Saturnin fit une autre découverte à ses dépends : le mal des transports... Il s'était toujours déplacé par ses propres moyens, mais là, se mouvoir sur quelque chose d'autre que ses jambes lui retournait l'estomac et étant donné qu'il n'osait pas descendre de peur de ne plus pouvoir remonter, il essayait instinctivement de fixer un point d'horizon pour détourner ses pensées et se concentrer sur autre chose que son mal être.

Pas facile dans le noir ...

Au bout de quelques heures et quelques renvois, il pouvait apercevoir la silhouette d’une jeune fille éclairée par les flammes d'un modeste feu de camp, assise sur une petite plage d’herbe a côté de laquelle mouillait une pirogue de simple facture. Sûrement Sangsue, en tout cas elle correspondait à la description qu'on lui en avait faite. Il maîtrisait plutôt bien son véhicule malgré son apprentissage chaotique, et voulu faire bonne impression devant la fillette. Sans trop savoir pourquoi, en plus de tirer sur les rennes pour freiner sa monture, il ajouta ce qu’il appellera plus tard une « commande vocale » :

-Hooo woo...
*Hooo wwoo ?? Tu penses vraiment qu'il te comprend le machin ??*

-Salut ! T'es Sangsue j'imagine ? *Dis oui* Moi c'est Saturnin, mais tu peux m'appeler Rascarcapac ... ... enfin, moi, c'est Rascarca...Se frotte les yeux avec sa main, laissant tomber sa tête légèrement vers l’avant en même temps qu’il soupir… bref laisse tomber. Je viens te ravitailler, on m'a donné des choses pour toi, attends, je vais descendre de... ça.

Il avait jeté un coup d'oeil aux environs avant de sauter de son chameau, mais il fut surpris par la profondeur soudaine du marais. L'eau lui arrivait à la taille et sa fraîcheur lui avait coupé le souffle.

*Expédition de merde... Je préfère les pommes de terre...*
*Je t’ai dit de la fermer !*

Tant bien que mal, il avait réussi à se hisser hors de son trou, et puis, après tout il avait déjà bu la tasse une première fois en début de soirée.

-Bon, voilà pour toi, si tu veux on peut passer un bout de nuit ensembles je repars la prochaine lune.

Grelotant, il s’était assis près du feu pour se sécher, il avait sortit un bout de viande son sac et le mastiquait tout en nettoyant soigneusement son nounours, souillé par la vase.